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Sous-section 1 - Constitution de la fiducie

Art. 623-2

Un contrat de fiducie devrait avoir deux fonctions essentielles :

  • La gestion (fiducie gestion) ;
  • La garantie (fiducie sûreté).

En cas de fiducie gestion, l’opération fait intervenir généralement deux types d’acteurs : le constituant et le fiduciaire, sachant qu’il peut y avoir plusieurs constituants ou plusieurs fiduciaires pour une même fiducie.
En cas de fiducie sûreté, l’opération fait intervenir trois types d’acteurs : le constituant, le fiduciaire et le bénéficiaire de la sûreté, lequel peut être le fiduciaire s’il est par ailleurs le créancier du constituant.
Le ou les bénéficiaires sont :

  • Le ou les constituants par défaut et selon les dispositions de l’article 2030 du code civil « lorsque le contrat de fiducie prend fin en l’absence de bénéficiaire, les droits, biens ou sûretés présents dans le patrimoine fiduciaire font de plein droit retour au constituant » ;
  • Le fiduciaire ou un tiers sous réserve des dispositions de l’article 2013 du code civil.

Code civil

Art. 2011

La fiducie est l'opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, ou un ensemble de biens, de droits ou de sûretés, présents ou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires qui, les tenant séparés de leur patrimoine propre, agissent dans un but déterminé au profit d'un ou plusieurs bénéficiaires.

Art. 2015

Seuls peuvent avoir la qualité de fiduciaires les établissements de crédit mentionnés à l'article L. 511-1 du code monétaire et financier, les institutions et services énumérés à l'article L. 518-1 du même code, les entreprises d'investissement mentionnées à l'article L. 531-4 du même code ainsi que les entreprises d'assurance régies par l'article L. 310-1 du code des assurances.
Les membres de la profession d'avocat peuvent également avoir la qualité de fiduciaire.

Art. 2016

Le constituant ou le fiduciaire peut être le bénéficiaire ou l'un des bénéficiaires du contrat de fiducie

Art. 2018

Le contrat de fiducie détermine, à peine de nullité :
1° Les biens, droits ou sûretés transférés. S'ils sont futurs, ils doivent être déterminables ;
2° La durée du transfert, qui ne peut excéder quatre-vingt-dix-neuf ans à compter de la signature du contrat ; 3° L'identité du ou des constituants ;
4° L'identité du ou des fiduciaires ;
5° L'identité du ou des bénéficiaires ou, à défaut, les règles permettant leur désignation ;
6° La mission du ou des fiduciaires et l'étendue de leurs pouvoirs d'administration et de disposition.

Art. 2030

Lorsque le contrat de fiducie prend fin en l'absence de bénéficiaire, les droits, biens ou sûretés présents dans le patrimoine fiduciaire font de plein droit retour au constituant.
Lorsqu'il prend fin par le décès du constituant, le patrimoine fiduciaire fait de plein droit retour à la succession

Caractéristiques du contrat de fiducie – Note de présentation de l’avis CNC n° 2008-03 du 7 février 2008 relatif au traitement comptable des opérations de fiducie

  • Propriété fiduciaire

Les attributs du propriétaire fiduciaire sont limités.

  • Le fiduciaire ne bénéficie pas personnellement des revenus de la fiducie et ne peut aliéner à son profit les biens fiduciés.
  • La propriété ordinaire confère sur les biens le pouvoir d’usage, de jouissance et de disposition. Or, la propriété fiduciaire ne confère pas nécessairement tous ces pouvoirs qui feront l’objet d’aménagements particuliers selon les dispositions prévues dans chaque contrat de fiducie.
  • La propriété ordinaire est perpétuelle car elle n’est pas limitée dans le temps. La propriété fiduciaire est par essence temporaire car limitée par la durée de la fiducie.
  • Concept de patrimoine d’affectation

Les biens ou droits transférés par le constituant au fiduciaire devront être, de par la loi, comptabilisés et gérés dans un patrimoine séparé, appelé fiducie. Il s’agit d’un patrimoine autonome et distinct du patrimoine propre du fiduciaire. Cette notion n’est pas totalement nouvelle dans les normes comptables françaises. Ainsi le CNC, dans l’avis 2004-16 du 27 octobre 2004, s’est déjà prononcé sur le traitement comptable des opérations réalisées dans le cadre d’un patrimoine d’affectation au paragraphe 1 :
« Les dispositions législatives relatives à certaines opérations d’assurance prévoient que l’actif correspondant à ces opérations est affecté au règlement des prestations liquidées ou non. Ces dispositions conduisent à un cantonnement strict de ces opérations et imposent de tenir une comptabilité auxiliaire d’affectation pour les enregistrer.
Ce cantonnement a pour objet de préserver le droit des assurés d’exercer un privilège spécial prévu par la loi sur le patrimoine d’affectation des opérations concernées.
Ces dispositions législatives imposent à l’organisme d’assurance gestionnaire de gérer comptablement de façon distincte les opérations du patrimoine d’affectation et celles du patrimoine général. »
Cette gestion comptable se traduit par la tenue « d’une comptabilité auxiliaire d’affectation » selon les termes réglementaires, au sein de l’entreprise d’assurance, qui entraîne une comptabilisation distincte des opérations susvisées, mais dans le bilan de l’entreprise d’assurance. Le terme de patrimoine d’affectation retenu dans le libellé de l’avis n° 2004-16 n’est pas approprié.
Dans le cadre du contrat de fiducie, le transfert des biens ou droits dans un patrimoine séparé du patrimoine propre du fiduciaire, entraîne la comptabilisation autonome des opérations de fiducie, avec l’établissement d’un jeu complet de comptes séparés, dans les conditions prévues aux articles L. 123-12 à L. 123-15 du code de commerce.
Sauf stipulation contraire du contrat, un résultat est constaté au niveau de la fiducie et affecté au bénéficiaire qui peut être le constituant. Si la fiducie n’a pas la personnalité juridique, la méthode de comptabilisation décrite ci avant conduit à lui conférer la « personnalité comptable ».
Les éléments mis en fiducie constitueront une masse à part du fiduciaire ne pouvant être saisis que par les titulaires de créances issues de la gestion ou de la conservation de ces éléments. Toutefois le deuxième alinéa de l’article 2025 du code civil prévoit qu’« en cas d’insuffisance du patrimoine fiduciaire, le patrimoine du constituant constitue le gage commun de ces créanciers, sauf stipulation contraire du contrat de fiducie mettant tout ou partie du passif à la charge du fiduciaire. »

Art. 623-3

En raison du transfert de la propriété juridique tel qu’organisé par la loi, les actifs et passifs faisant l’objet du contrat de fiducie sont transférés du patrimoine du constituant dans la fiducie, qui constitue un patrimoine d’affectation séparé du patrimoine propre du fiduciaire, au sein duquel ils feront l’objet d’une comptabilité autonome. En conséquence, le fiduciaire établit des comptes annuels au titre de la fiducie, comportant un bilan, un compte de résultat et une annexe, dans les conditions prévues aux articles L. 123-12 à L. 123-15 du code de commerce.

Transfert de la propriété juridique des actifs dans la fiducie – Note de présentation de l’avis CNC n° 2008-03 du 7 février 2008 relatif au traitement comptable des opérations de fiducie

L’application du contrat de fiducie conduit donc à considérer séparément les effets de la propriété juridique des actifs transférés en fiducie, qui seront, de par la loi, affectés et comptabilisés dans un patrimoine séparé, autonome et distinct du patrimoine du fiduciaire, et la propriété économique éventuellement conservée par le constituant.

Art. 623-4

Le patrimoine d’affectation peut comprendre des éléments d’actifs et de passifs se traduisant par le transfert d’un actif net positif (actifs supérieurs aux passifs) ou d’un passif net (passifs supérieurs aux actifs). En revanche, le transfert de passifs isolés est exclu.

Transfert d’une situation active ou passive – Note de présentation de l’avis CNC n° 2008-03 du 7 février 2008 relatif au traitement comptable des opérations de fiducie

L’article 2011 du code civil prévoit que « la fiducie est l’opération par laquelle un ou plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des sûretés, ou un ensemble de biens, de droits ou de sûretés, présents ou futurs, à un ou plusieurs fiduciaires […] ».
L’article 12 de la loi du 19 février 2007 prévoit en son paragraphe 1 que « les éléments d’actif et de passif transférés dans le cadre de l’opération mentionnée à l’article 2011 du code civil forment un patrimoine d’affectation. ».
Interrogées sur la possibilité de transmettre une situation active et passive à une fiducie, ou des passifs isolés, la chancellerie et la DGTPE ont considéré, dans une réponse par courriel du 22 mars 2007, que dans les situations de transmission d’actifs et de passifs, le passif pouvait excéder l’actif. En revanche le transfert de passifs isolés est exclu. Ces conclusions reprennent les conclusions des travaux parlementaires de monsieur Henri de Richemont (rapport n° 11) et de monsieur Xavier de Roux (rapport n° 3655).

§ 1 – Chez le constituant

Art. 623-5

Lors du transfert des biens, droits ou sûretés dans le patrimoine d’affectation, il convient de comptabiliser une contrepartie dans les comptes de bilan du constituant.
La constitution de cette structure modifie les droits ou obligations du constituant afférents aux biens, droits ou sûretés transférés dans la fiducie, y compris dans le cas où le constituant conserve le contrôle, car, même dans cette situation :

  • Tout au long de la fiducie, ses droits ou obligations sont limités aux seuls fruits ou charges générés par ces biens dont il n’a plus la disposition ;
  • Au terme de la fiducie les droits ou obligations du constituant portent sur leur restitution en nature ou en valeur.

Ces droits sont en effet de nature spécifique, fixés par les termes du contrat dès lors que le constituant n’a aucune possibilité de les modifier unilatéralement.

Art. 623-6

La contrepartie sera différente selon que la valeur des actifs excédera ou non le montant du passif éventuellement mis en fiducie.

  • Lorsque le montant des éléments d’actif excède le montant des éléments du passif mis en fiducie, les droits analogues à ceux des investisseurs financiers (comme les porteurs d’obligations, fonds séquestrés en garantie, fonds communs par exemple) relèvent quelle que soit la nature des biens mis en fiducie, de la catégorie d’un actif financier dénommé « 2661 - Droits représentatifs d’actifs nets remis en fiducie » au sein de l’actif immobilisé.
  • Lorsque le montant des éléments de passif excède le montant des éléments d’actif, il convient de constater une obligation dénommée « 162 - Obligations représentatives de passifs nets remis en fiducie » qui doit être enregistrée au passif du bilan avec l’ensemble des emprunts et dettes financières.

Art. 623-7

Le critère de contrôle défini à l’article 211-1, bien que non retenu pour définir les conditions de comptabilisation de ces éléments, en raison de l’application du principe de la propriété juridique posé par la loi, est appliqué pour évaluer les éléments transférés par le constituant à la fiducie, afin d’avoir une méthode d’évaluation homogène pour les comptes individuels et consolidés. Le contrôle ainsi défini conduit à considérer si le constituant conserve ou perd les avantages ou risques économiques afférents aux éléments remis à la fiducie.
Du fait de ses caractéristiques, la fiducie qui n’a pas la personnalité morale, est comparable à une entité ad hoc, i.e. une « structure juridique distincte, créée spécifiquement pour gérer une opération ou un groupe d’opérations pour le compte d’une entreprise ». Il est donc fait référence aux critères prévus pour la détermination du contrôle des entités ad hoc au paragraphe 10 052 des règlements relatifs aux comptes consolidés (1).
L’examen des critères suivants est nécessaire pour définir si le constituant contrôle la fiducie.

  • Le constituant dispose en réalité des pouvoirs de décision, assortis ou non des pouvoirs de gestion sur la fiducie ou sur les actifs qui la composent, même si ces pouvoirs ne sont pas effectivement exercés. Il détermine les termes du contrat de fiducie et l’étendue des pouvoirs de gestion qui seront donnés au fiduciaire.
  • Le constituant a, de fait, la capacité de bénéficier de la majorité des avantages économiques de la fiducie, que ce soit sous forme d’affectation du résultat ou de droit à une quote-part d’actif net ou à la majorité des actifs résiduels en cas de liquidation ;
  • Le constituant supporte la majorité des risques relatifs à la fiducie. La répartition des risques est fixée dans le contrat.

L’existence d’un mécanisme d’auto pilotage (prédétermination des activités de la fiducie) ne préjuge pas du contrôle effectif de cette entité par une contrepartie donnée. L’analyse des critères définis précédemment est dès lors nécessaire pour caractériser l’existence d’un contrôle. En particulier, lorsqu’un tel mécanisme oriente les décisions dans l’intérêt d’une des parties, cette dernière est considérée comme exerçant un contrôle de fait.
Le premier critère relatif aux pouvoirs de décision est prédominant. Il est également nécessaire de prendre en considération le deuxième ou le troisième critère. En conséquence, une fiducie est contrôlée si les conditions du premier et du deuxième critère, ou du premier et du troisième critère, sont remplies. En outre, dès lors que les deuxième et troisième critères se trouvent réunis, la fiducie est également considérée comme contrôlée.
La perte du pouvoir de décision par le constituant est déterminante pour qualifier la perte de contrôle. La conservation de la majorité des risques et des avantages économiques afférents aux actifs transférés dans la fiducie constitue une présomption de conservation d’une partie significative du pouvoir effectif de décision.
Conséquences du maintien ou de la perte du contrôle. Si le constituant perd le contrôle :

  • Les éléments transférés du patrimoine du constituant dans le patrimoine d’affectation de la fiducie sont évalués à la valeur vénale ;
  • L’actif ou le passif financier enregistré chez le constituant en contrepartie, est évalué à cette même valeur. Si le constituant conserve le contrôle :
  • Les éléments transférés du patrimoine du constituant dans le patrimoine d’affectation de la fiducie sont évalués à la valeur comptable ;
  • L’actif ou le passif financier enregistré chez le constituant en contrepartie, est évalué à cette même valeur. Le constituant est notamment réputé conserver le contrôle de la fiducie :
  • Lorsqu’il est l’unique bénéficiaire ;
  • Lorsque le contrat est conclu avec un ou plusieurs constituants et que chacun d’eux conserve la quasi- totalité des risques et des avantages relatifs aux éléments transférés (notamment en cas d’absence de mutualisation effective des risques et avantages au sein de la fiducie ou en cas d’apports de biens fongibles) ;
  • Lorsqu’il conserve le bénéfice de l’intérêt résiduel sur le ou les actifs en fin de contrat à travers le retour de ces derniers en pleine propriété avec le rétablissement du droit à l’usufruit perpétuel.

Dans le cas où la fiducie ne serait pas comparable à une entité ad hoc, par exemple en cas de contrôle non exclusif, il convient de procéder à l’analyse du contrôle selon les dispositions des paragraphes n°1 000 et suivants des règlements relatifs aux comptes consolidés (2).

(1) Règlement n°99-02 relatif aux comptes consolidés des sociétés commerciales et entreprises publiques Règlement n°99-07 relatif aux règles de consolidation des entreprises relevant du CRBF
Règlement n° 2000-05 relatif aux règles de consolidation et de combinaison des entreprises régies par le code des assurances, des mutuelles et unions régies par le code de la mutualité et des institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale ou le code rural.

(2) Règlement n°99-02 relatif aux comptes consolidés des sociétés commerciales et entreprises publiques Règlement n°99-07 relatif aux règles de consolidation des entreprises relevant du CRBF
Règlement n° 2000-05 relatif aux règles de consolidation et de combinaison des entreprises régies par le code des assurances, des mutuelles et unions régies par le code de la mutualité et des institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale ou le code rural

Art. 623-8

L’opération de transfert des éléments au patrimoine d’affectation de la fiducie, est enregistrée au compte de résultat du constituant dans :

  • Un sous compte « 7741 - Opérations liées à la constitution de la fiducie - transfert des éléments », du compte « 774 - Opérations de constitution ou liquidation des fiducies » pour les produits, ou ;
  • Un sous compte « 6741 - Opérations liées à la constitution de la fiducie - transfert des éléments », du compte « 674 - Opérations de constitution ou liquidation des fiducies » pour les charges.

Contrepartie dans la fiducie – Note de présentation de l’avis CNC n° 2008-03 du 7 février 2008 relatif au traitement comptable des opérations de fiducie

La fiducie n’a pas de personnalité morale. A ce titre les éléments transférés dans le patrimoine d’affectation de la fiducie ne répondent pas à la définition de capital social (réservé aux entités ayant la personnalité morale). Cette contrepartie, égale au montant de l’actif ou du passif net remis en fiducie sera comptabilisée dans un compte « 102 - Fonds fiduciaires ».

§ 2 – Chez le fiduciaire

Art. 623-9

Les éléments transférés au fiduciaire sont comptabilisés, chez ce dernier, dans la fiducie, au bilan d’un patrimoine séparé dit d’affectation, distinct du bilan propre du fiduciaire. Les éléments transférés sont, par symétrie, évalués à la valeur nette comptable ou vénale, selon les valeurs retenues chez le constituant.
La contrepartie des éléments reçus en fiducie est comptabilisée dans un compte « 102 - Fonds fiduciaires » égal au montant de l’actif ou du passif net remis en fiducie. Son montant peut être débiteur ou créditeur.


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